Editorial. En Afrique, la sculpture tout comme la peinture traditionnelle ou celle qui met en exergue les valeurs ou cultes endogènes, est, peu à peu, en train de disparaitre, au profit du model occidental. Raison : L’expansion des religions dites relevées, occulte les religions endogènes africaines, qui sont désormais considérées, par certains, comme des pratiques contre-nature, ne méritant plus, selon eux, d’être exaltées à travers l’art. Pourtant, c’est une assertion, qui, de notre point de vue, est plutôt suicidaire en ce sens qu’elle conduit l’art africain vers sa perte, sinon la perdition. Loin de nous, l’idée de révoquer les libertés d’expressions religieuses et culturelles, mais, à notre sens, cela est très malheureux de constater qu’aujourd’hui, alors que nous parlons du développement de l’art africain, nombreux sont ces artistes sculpteurs et peintres  qui n’ont pas véritablement le goût de l’art spirituel de chez eux. Reniement ? En tout cas, ces artistes ont le vent en poupe : ils peuvent réaliser des œuvres caricaturales, idéalistes, populistes, sous le model occidental, mais avec très peu de graines endogènes, sinon aucune. Ils se cantonnent à miroiter l’art occidental et ses caractéristiques attrayants, seule aubaine pour eux de s’extirper des profondeurs des cultes africains à l’instar du vaudou. Ces cultes ayant été diabolisés par l’africain, lui-même, il lui parait très difficile aujourd’hui d’embrasser une forme d’art qui mettrait en valeur ces pratiques, ou tout au moins, en parlerait. Mais pratiquer et parler, c’est bien deux choses différentes. On peut bien exposer les valeurs, les cultes et coutumes de chez soi sans toutefois être un fervent pratiquant. Il faut une révolution mentale pour que les artistes comprennent que l’art c’est la première expression identitaire d’un peuple.
L’art en Afrique devrait se focaliser d’abord sur l’ensemble des cultures endogènes, en
relatant les histoires des peuples, leurs cultures, les traditions et leurs religions. Faisant la louange des danses, chants et rythmes africains, Léopold S. Senghor disait « au commencement était la parole ; mais une parole chanter, rythmer ». L’Afrique à mieux à gagner que de s’envelopper dans une forme d’expression artistique, qui n’est pas la sienne et qui, de loin, est peu bénéfique pour le continent. C’est pourquoi nous saluons et félicitons  le Sculpteur FOFANA yasser, un togolais, qui, lui, s’est lancé corps et âme dans l’art spirituel et fais, sans doute,  la fierté de ses ancêtres. Certes, il n’est pas le seul dans ce domaine artistique, mais très peu sont-ils dans  ce type d’art. Les autres qui sont toujours ronchons quant à la dévaluation de l’art africain, accusant les dirigeants à tort, n’arrivent pas à détecter leurs propres responsabilités dans ce qui s’apparente à un fiasco collectif. Chaque artiste devrait ainsi se remettre en cause, pour définir les bonnes orientations pour ses productions artistiques. Quid du public ?
Généralement, le public ne reçoit que ce qu’il demande et donc, l’artiste ne produit que ce qui peut lui sembler vite vendable. Dans ce cas, les artistes estiment que le public étant totalement aux antipodes des valeurs endogènes comme les cultures vaudou, leur proposer une forme d’art, qui est liée à ces cultes, n’aurait pas grand succès. Mais ce que oublient les partisans de cette conception, c’est que même les arts contemporains ne trouvent pas grand écho favorable chez le public africain, car la plupart des gens n’ont pas grands intérêts à cause de la pauvreté et des coûts exorbitants des œuvres, selon eux. D’une manière ou d’une autre, il y aura toujours des preneurs et des frileux, mais le plus nécessaire c’est que l’artiste, lui, arrive à s’exprimer, à faire transcender un message lié à ses valeurs culturelles et sociologiques, loin de tout « esclavagisme culturel ».

Somme toute, le moins qu’on puisse dire, c’est que l’art n’est pas encore développé en Afrique parce que les artistes eux-mêmes ne prennent pas la mesure de ce développement en choisissant de bonnes visions pour leurs œuvres. Si nous ne prenons pas soins de faire la promotion de nos propres valeurs, qui le fera pour nous ?

Charles AYI