Nash tient d’abord à clarifier les choses: “Je ne suis pas un homme, je suis une femme, j’ai le style d’un mec mais je suis vraie gal”, affirme la rappeuse ivoirienne dans la reprise de Ye Te Ho qu’elle vient de signerer avec Nathalie Makoma. Elle n’accepte pas vraiment d’etre placée dans le féminism. A l’état civil, Natacha cherche néanmoins à donner une conception autre que l’ordinaire que les gens ont de la femme dans son pays. Ainsi, elle exhorte les femmes à adopter un certain comportement : “Respectons nos corps, faisons nous respecter […] Evitons que les hommes nous fassent du tort […] Ne laisse pas n’importe qui, n’importe quoi te toucher, go, sans compter qu’il ne faut pas te dépigmenter […] Habillons-nous décemment pour ne pas qu’on nous insulte”, dit une des chansons de son album Ziés Dedjas paru en 2008.
La volonté de conférer une dimension sociétale à ses textes apparait dès le premier titre qui la révèle en 2002 au public ivoirien. Elle était au lycée, et un doyen du hip-hop local l’invite sur un projet de compilation rap. Il lui propose le beat de Premier Gaou, de Magic System. Elle en fait une parodie avec Première Djandjou (terme qui désigne une fille facile). Son succès vient aussi du nouchi dans lequel elle s’exprime, cet argot ivoirien qu’elle définit ainsi : “N comme langue nationale, O comme originalité, U qui prône l’unité, C créole ivoirien, H basé sur l’humour, I identité culturelle.”
Composé de différents mots de différents dialectes, saupoudrés d’un peu de français, ce langage de la rue fait figure d’“identité culturelle” qui doit être appréhendé dans un périmètre plus large. “C’est tout un ensemble : une philosophie, un état d’esprit, une manière de voir les choses”, précise l’artiste. Le monde universitaire s’y intéresse de près, des étudiants qu’elle a aidés en ont fait le sujet de leurs thèses. Et, d’un point de vue plus pragmatique, les policiers se sont mis à l’utiliser pour s’adresser à la jeunesse.
Avec le festival Hip Hop Enjaillement qu’elle est parvenue à organiser l’an dernier et espère pérenniser, elle offre une tribune supplémentaire au nouchi. Tout en continuant à en faire la promotion à l’étranger, comme au festival des Eurockéennes en France où, après un premier passage en 2008, elle est revenue cette année avec un collectif baptisé Le Club des justiciers milliardaires d’Abidjan.

OLD_PACA