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Les tigres ont fait sortir le lion du bois. Fin février, le Prix Nobel de littérature (1986) Wole Soyinka a quitté son domaine verdoyant d’Abeokuta, au Nigeria, pour apporter son prestigieux parrainage aux « Tigritudes », un cycle de cinéma panafricain mis sur pied par les réalisatrices Dyana Gaye et Valérie Osouf et présenté durant six semaines au Forum des images, à Paris. Le nom du festival est une référence directe à l’une des saillies les plus fameuses de l’écrivain nigérian. « Le tigre ne proclame pas sa tigritude, il bondit sur sa proie et la dévore », avait-il ironisé en 1962, répondant à une question sur le concept de « négritude » porté alors par Léopold Sédar Senghor, Léon-Gontran Damas et Aimé Césaire.
Six décennies plus tard, Wole Soyinka, 87 ans, crinière blanche et regard pétillant, croit plus que jamais à l’importance d’une parole agissante. Dramaturge, metteur en scène et acteur lui-même, ce fils d’une commerçante et d’un pasteur et directeur d’école, né dans une famille yoruba, a plus d’une fois payé son militantisme contre le colonialisme puis le pouvoir nigérian par des emprisonnements et des périodes d’exil. Ce qui ne l’a pas empêché d’exercer toujours avec acuité son sens critique de citoyen.
Auteur d’une œuvre protéiforme de plus de 45 textes édités, allant du théâtre à la poésie en passant par l’essai et les récits autobiographiques, Wole Soyinka a publié seulement quatre romans, dont le dernier, Chronicles from the Land of the Happiest People on Earth (Pantheon Books, non traduit), en septembre 2021. Il y évoque la vente, à des fins rituelles, de parties de corps humains, orchestrée par une société secrète comptant de hautes personnalités politiques et religieuses du pays.
Au moment où retentissent en France les échos de l’invasion de l’Ukraine par la Russie, le grand aîné des lettres africaines réaffirme sa foi en l’écriture et la création. Pas pour changer le monde, mais pour ne jamais renoncer à l’interroger. Et éloigner, un peu, le pessimisme qui, partout, gagne.
Vous avez connu les années 1960, une époque de libération et d’immense espoir pour l’Afrique. Le monde que vous décrivez dans Chronicles from the Land of the Happiest People on Earth est tout autre…
Oui, le titre est ironique, pour le moins ! L’état du monde se reflète toujours dans ce que j’écris et Chronicles est une satire politique. Mon intention n’est pas de suivre la courbe négative des événements, j’essaie d’exposer la réalité et ce qu’elle fait aux gens… Je me rends compte d’ailleurs que tous ceux qui créent actuellement au Nigeria, qu’ils soient musiciens, peintres ou poètes, ont ce même sentiment d’un pays en panne, d’une nation déchue qui s’efforce de maintenir l’apparence d’une entité viable sans vraiment y parvenir. Bien entendu, il y aura toujours des gens qui se moquent de voir le pays sombrer, parce qu’ils trouveront toujours le moyen de s’en sortir en marchant sur les autres. Mais le système global est vicié.
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