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La première fois qu’on l’aperçoit, son aspect surprend. Un ventre énorme – la moitié d’une grosse calebasse évidée, recouverte d’une peau de bête (vache ou chèvre) –, un manche planté au milieu, sur lequel sont tendues des cordes, avec deux poignées en bois de chaque côté. Sa sonorité cristalline étonne bien plus encore. Un pur vertige.
J’ai été mis sous son emprise à la fin des années 1980. L’album de kora Kaira, du musicien malien Toumani Diabaté, m’a littéralement emballé. Harpe-luth à vingt et une cordes (sept pour le passé, sept pour le présent, sept pour le futur, dit-on), jouée déjà au XIIIe siècle, à travers le vaste empire mandingue qui s’étendait sur les actuels territoires du Mali, du Sénégal, de la Gambie, la Mauritanie, la Guinée, le Burkina Faso et de la Côte d’Ivoire, la kora est l’instrument roi des djelis, les griots d’Afrique de l’Ouest. Une caste de musiciens, chanteurs et passeurs de mémoire à laquelle Toumani Diabaté se rattache.
Né à Bamako, en 1965, Toumani Diabaté, maestro absolu, est l’une des sommités mondiales de la kora. Il a appris, de son père Sidiki Diabaté et de son grand-père, toutes les subtilités, les nuances, les infinies variations de l’instrument. Son album Kaira enchaîne des mélodies coulant comme une eau claire, cinq pièces d’une musicalité exaltante, jouées en solo, enregistrées dans un studio londonien, en 1987. C’est l’année où le public occidental découvrait cet instrument grâce au musicien et chanteur guinéen Mory Kanté (1950-2020), avec Yéké yéké qui deviendra un succès mondial.
Illustre papa
Dans Kaira, Toumani Diabaté relit de grands classiques du répertoire traditionnel de la kora. Dont Alla l’aa ke, composé au début du XXe siècle par son père, Jarabi, une chanson d’amour née dans la région de Kita, dans l’ouest du Mali, ou encore Kaira, composé également par son père, dans les années 1940. L’illustre papa pouvait se rassurer. Dans ce premier album solo, le fiston rappelait son attachement aux racines et à la mémoire. Ce qui ne l’empêchera nullement d’aller voir ailleurs, toujours volontaire pour l’échange et l’aventure.
Il le prouvera à travers de multiples collaborations, tout au long de sa carrière. De ses tissages avec l’ensemble flamenco Ketama au bluesman américain Taj Mahal, du joueur de koto japonais Brian Yamakoshi à l’Islandaise Björk, ou encore du leader des groupes Blur et Gorillaz Damon Albarn au chanteur de reggae ivoirien Tiken Jah Fakoly, sans oublier le projet Lamomali du chanteur -M-, dans lequel Toumani Diabaté a embarqué son fils, qui s’appelle lui aussi Sidiki Diabaté, coqueluche de la jeunesse malienne. Cette posture a sa raison d’être : « Je me sens toujours comme appartenant à la grande famille des griots du Mandé. Notre rôle est de faire partager notre musique, explique Toumani Diabaté. Le fait de la jouer avec des musiciens d’autres horizons va pour moi complètement dans ce sens. »
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